Low Cost et Service Gagnant
Il a pour principe de répercuter, sur le prix final consommateur, la minoration des coûts inhérents à un produit ou service.
On pense souvent aux compagnies aériennes :
La principale particularité de ces compagnies est de s'être lancées dans une chasse aux coûts annexes, d'où leur nom de low cost. Dans cette optique, Internet a été directement intégré au cœur du modèle low cost, le Net offrant à ces compagnies un canal de distribution en direct à moindre coût, mais également un outil de réduction des coûts liés aux services d'enregistrement au sol, et un vecteur de publicité et de recrutement économique.
Mais ce concept s’étend à d’autres secteurs,comme la grande distribution
Ainsi, une entreprise se basant sur ce concept, cherchera à proposer des prix attractifs en minimisant ses coûts fixes et ses coûts variables.
Ralph Hababou (PBRH Conseil) :
"Le client veut être rassuré, pouvoir zapper... et sauver la planète !"
Comment contrer la guerre des prix ?
Par le service !
Mini de BMW, iPod, Darty, DHL, commerce équitable...
L'expert du service aux clients dévoile les stratégies des meilleures entreprises en la matière.
A l’heure où le client est roi, le low cost semble triompher.
Pourtant, il existe d’autres moyens pour les entreprises de gagner la bataille sans baisser les prix : offrir du sens, des services, de l’innovation et de l’originalité.
Ralph Hababou, cofondateur de la chaîne Colombus Café, auteur en 1986 de Service compris et en 2007 de Service gagnant, a répondu aux questions des lecteurs de JDN Management et expliqué comment les meilleures
entreprises s'y prennent pour faire de leur service aux clients un tremplin vers le succès
Après votre premier ouvrage, Service compris, pourquoi avez vous voulu "ré-enfoncer le clou" ? Qu'est-ce qui a changé depuis 20 ans ?
Ralph Hababou. 20 ans après, trois choses ont
fondamentalement changé.
Premièrement, la Chine plus l'Inde, ce sont près de deux milliards d'individus qui faisaient autrefois autre chose que concurrencer nos entreprises.
Deuxièmement, le tsunami des high-tech a totalement bouleversé la relation au client.
Et troisièmement, le phénomène low cost a émergé : ce qui m'intéresse, c'est que tout le monde a en face de lui un prestataire prêt à vendre beaucoup moins cher. Ce qui oblige ceux qui
vendent plus cher à donner de bonnes raisons au client de payer le prix fort.
Quelle est votre vision de la relation client telle qu'elle est pratiquée aujourd'hui ?
Je dis que c'est comme le sexe pour les adolescents. Ils ne pensent qu'à ça, ne parlent que de ça et le font très peu.
Et quand ils le font, ce n'est vraiment pas génial. Pour le service, c'est pareil : que de discours, de séminaires, de slogans pub et si peu de résultats tangibles. Il y a donc encore énormément
de travail !
Le service n'est-il pas un luxe, quand le pouvoir d'achat du consommateur ne lui laisse pas le choix de ses achats ?
Le consommateur est devenu schizophrène : il cherche le prix le moins cher quand il est client et en tant que citoyen, il se plaint
entreprises qui délocalisent pour produire moins cher.
Cela dit, certains clients seront toujours prêts à payer plus cher pour un vrai service ou pour s'offrir du luxe de temps en temps, quitte à économiser sur ce qui ne leur paraît pas essentiel
(par exemple l'alimentation).
Ensuite, je crains que la valeur ajoutée apportée par le service ou l'innovation soit la seule chose qu'il nous reste face à des pays à bas coûts.
Le hard-discount rencontrera-t-il un jour ses limites ?
On voit bien les chaînes de hard discount plafonner à 13-14 % du marché de l'alimentaire, par exemple.
Dans d'autres secteurs, c'est plus, puisque Easyjet est déjà la quatrième compagnie en France en termes d'atterrissages.
Cela dit, le low cost est encore amplifié par Intenet.
Souvenez-vous qu'en moins d'une heure, venteprivée.com a vendu 86 Peugeot 1007 avec un rabais de 35 %.
iPod et Mini… ces exemples évoquent plus le marketing que le service, non ?
C'est autant du marketing que du service.
Comme je le raconte dans Service gagnant, l'iPod bénéficie d'un service mondial de remplacement en quelques jours par un appareil neuf.
Quant à Mini, des salons et un environnement spécifiques ont été créés pour prolonger son image.
Et BMW qui est réputé pour la qualité de son service et de son assistance en a fait bénéficier sa filiale Mini.
Quelles sont les nouvelles tendances en matière de services aux clients ?
Tout d'abord l'hyperpersonnalisation, car chaque client veut avoir le sentiment d'être unique. Mais aussi le besoin de simplification et de
simplicité.
La rapidité, voire le sentiment d'urgence qui fait qu'on passe des années "fax" aux années "clic" et que l'on évoque aujourd'hui les années "blink" (clignement de la paupière).
Enfin, la tendance bio, le commerce équitable et le développement durable : on veut se donner bonne conscience et on est prêt à payer plus cher pour sauver la planète et aider les
autres.
Quel est selon vous le meilleur acteur en terme de service ? Dans le secteur propre aux services et dans le secteur industriel ?
Question difficile tant le service est un art exigeant.
Dans le secteur des services, des entreprises telles que DHL et FedEx, qui accomplissent tous les jours des miracles en termes de délais de livraison avec une organisation millimétrée, forcent
l'admiration.
Ce sont les vrais partenaires de la mondialisation des échanges.
Pour le secteur industriel, la société Lafarge, qui crée le ciment Sensium (ciment sans poussière) avec tout un accompagnement des maçons (résistants au changement) est
intéressante.
Comment une marque devient-elle légendaire ?
C'est tout d'abord une obsession de la part de ses fondateurs et dirigeants.
Darty, Decaux, Disney, etc. ont toujours incarné au plus haut le service ou la propreté. Ensuite, c'est la force d'un positionnement qui tire l'entreprise et ses produits vers le haut, au
lieu de casser les prix.
Enfin, pour devenir une légende, il faut investir en permanence sur les hommes et les femmes qui y travaillent : motivation, formation, communication...
Comment fait-on pour offrir plus de services sans faire exploser les prix ?
C'est la vraie question. En étant plus malin que les autres.
En écoutant vraiment ce que dit et ce dont se plaint le client.
Il a souvent des besoins relativement simples à satisfaire et pas forcément très coûteux, contrairement à ce que l'on pense.
Enfin, industrialiser et informatiser tout ce qui n'a pas de valeur ajoutée (comme la consultation d'un compte bancaire) pour réorienter ses budgets vers le traitement des problèmes ou un service
plus personnalisé.
Peut-on utiliser la culture du service pour motiver ses équipes en interne ? Pensez-vous que c'est un bon vecteur de fierté corporate ?
Dans une culture produit, la motivation vient du plaisir du travail bien fait : un ébéniste voit son meuble et cela lui suffit pour
être heureux.
Ce n'est pas du tout pareil dans le service : le client est de plus en plus exigeant et de moins en moins reconnaissant.
La motivation et la valorisation ne peuvent donc pas venir de lui.
Or l'individu en a besoin pour donner le meilleur de lui-même.
C'est donc au management de compenser cela par des "employés du mois", des challenges, des félicitations, des primes, etc.
Comment donner une culture du service à une entreprise qui en est dépourvu ? A quel niveau faut-il agir ?
Certains cas sont désespérés.
Et, ne vous inquiétez pas, la concurrence va s'en charger... Cela dit, il faut agir au niveau le plus haut de la hiérarchie.
Si le patron n'est pas le premier à montrer l'exemple, pourquoi voulez-vous que les employés "ils se décarcassent" ?
Quelle est pour vous l'erreur la plus couramment commise par les entreprises en terme de services ?
D'oublier le respect du basique. On imagine de nouveaux services sensés casser la baraque.
Et on néglige du coup des trucs tout simple qui sont pourtant 80 % de la demande du client. Par exemple un site Internet fabuleux mais où il est impossible de trouver le numéro de
téléphone.
Le service, est-ce aussi un outil face à la concurrence des autres pays ? Pensez-vous que la France a encore des progrès à faire ? Et ainsi un potentiel de croissance ?
Face à la concurrence, je dirais même que c'est le seul moyen.
D'abord parce que certains services sont difficiles à délocaliser.
Ensuite, parce qu'il est plus facile d'innover en matière de service que sur le produit.
La France a encore beaucoup de travail à faire.
C'est la première destination touristique au monde... et pourtant, combien de gens qui travaillent dans ce secteur continuent à mal parler l'anglais ?
Nous avons des atouts formidables mais souvent gâchés par une culture latine qui voit dans l'autre (le touriste, le client, etc.) un gêneur ou, pire, un intrus.
Quelles sont les caractéristiques du client d'aujourd'hui ?
J'ai identifié dans Service gagnant les neuf nouvelles tendances du client : il veut tout, tout de suite, il en veut pour son argent, il veut être rassuré, pouvoir zapper, pouvoir réclamer, il en veut toujours plus, il veut sauver la planète...
Bonjour, je suis dans une industrie où le conseil du vendeur est très important mais où le prix des produits baisse régulièrement. Ce qui fait que nos vendeurs donnent les conseils et ensuite les clients "font le tour des popotes" et achètent les produits dont ils ont besoin à bas prix (discount ou internet). Avez vous déjà rencontré cette situation très démotivante pour les vendeurs ? Comment faire pour l'éviter ?
Pas facile, comme question.
Si vos produits sont si faciles à acheter ailleurs, ne faut-il pas trouver d'autres produits ou d'autres moyens de les commercialiser ?
Une agence de voyage ne peut pas lutter contre l'efficacité de voyages-sncf.com ou du site d'Air France (sans parler des Ryanair et autres Easyjet).
Il faut peut-être renouveler votre offre et la rendre plus différenciante.
Ensuite, trouver des idées pour rendre des services que vous êtes les seuls à offrir (ou à faire payer).
Enfin, il y a peut-être d'autres choses à faire faire à vos vendeurs pour rendre leur travail plus motivant. A mon avis, vous subissez le tsunami du high-tech et du low cost et vous ne ferez pas
l'économie d'une vraie remise à plat de votre business model. Votre seule chance : l'innovation permanente et l'imagination.
Et n'oubliez pas, ce n'est pas une étude de marché sur le fax qui a permis d'inventer l'e-mail…
Comment savoir à l'avance si un service ne va pas être inutile ?
Il est impossible de savoir à l'avance ce que le client va penser et comment il va utiliser vos produits.
Qui aurait imaginé il y a 20 ans que McDo serait le premier restaurateur français ?
Si on avait dit aux clients qu'ils allaient manger debout des sandwiches dégoulinants de sauce et d'autres produits au nom anglais (nuggets, burger, etc.), on vous aurait pris pour un
fou
. Le client ne sait pas ce qui marchera tant qu'il n'est pas face au produit ou au service. Idem pour le portable, dont personne n'avait prédit l'invasion dans notre vie
quotidienne.
L'ère des services n'est-elle pas en train de créer des besoins qui n'existaient pas auparavant ?
C'est vrai.
Mais s'il y a une demande solvable (que des gens sont prêts à payer), pourquoi pas ? Aujourd'hui, les seniors disposent de temps et de pas mal d'argent pour consommer des services à la
personne.
Ce sont des consommateurs de formation à l'informatique à la maison, de jardinage...
Idem pour les parents qui travaillent et qui sont prêts à payer des gens pour faire ce qu'ils n'ont pas le temps (ou pas l'envie) de faire : les devoirs des enfants, le ménage, etc.
Pensez- vous réaliste d'attendre du "service" public qu'il suive les traces des meilleurs exemples du privé comme c'est, par exemple, le cas au Canada ?
Mon livre commence par deux anecdotes :
la première, très positive, vécue auprès d'un centre des impôts
et la seconde, malheureusement moins géniale, avec Darty.
J'explique au cours de mes conférences que certains services publics sont en train de faire mieux que des entreprises concurrentielles.
La Sécu était pendant des années le symbole de ce qui se fait de pire en matière de service aux usagers (on ne parlait même pas de client).
Aujourd'hui, ils ont des centres d'appels tout à fait professionnels et on peut consulter ses remboursements sur Internet.
Gare à ceux qui n'ont pas évolué au même rythme !
On dit souvent que les USA sont très bons en services. Est-ce vrai ?
En France, on est capable du meilleur comme du pire.
Aux USA, on s'intéresse moins au client qu'à son portefeuille et à son argent.
Ensuite, le service est toujours dans une bonne moyenne mais il est très difficile de sortir du cadre ou de la procédure telle qu'elle est établie.
Alors que dans nos pays, on peut vivre des expériences exceptionnelles.
Le paradoxe est qu'on aime rendre service mais qu'on déteste être au service.
Quand vous ajoutez à cela l'argent, cela rend les choses encore plus compliquées.
Toujours sur la schizophrénie, les clients ne veulent-ils pas un service très personnalisé (la société doit chercher à savoir au plus près son
profil et ses désirs) en exigeant que soit respecté leur anonymat (pas d'intrusion intempestive…) ?
On est souvent sur le fil du rasoir.
Pour bien servir un client, on doit savoir qui il est et ce qu'il souhaite.
Sans aller trop loin, car la peur de Big Brother règne toujours.
D'où l'importance de créer des clubs dans lequel le client se sent en sécurité et de faire en sorte qu'il sache à quoi sont destinées ses informations personnelles.
Une compagnie aérienne qui vous connaît personnellement (par exemple par votre numéro de carte de fidélisation de type Flying Blue) sait par définition où vous aimez aller, dans quelle
classe vous voyagez, vos choix alimentaires, etc.
Cela peut être utile mais aussi parfois gênant.
Ainsi, un client qui fréquente régulièrement un hôtel et qui y vient pour la première fois avec son épouse peut ne pas aimer être accueilli par un "ravi de vous revoir, Monsieur
!".
D'où tirez-vous vos idées ? Quelles sont vos sources d'inspiration pour innover dans le service ?
Mon métier d'auteur et de conférencier fait que je rencontre énormément de gens, en France et dans le monde, dans des métiers et des secteurs tout à
fait différents.
J'ai toujours avec moi un petit bloc-poche dans lequel je note des idées, des citations ou des anecdotes.
Pour écrire Service gagnant, on me demande souvent combien de temps j'ai mis.
Je réponds : un an et demi et 20 ans, puisque mon aventure a commencé avec le succès de mon premier livre, Service compris, vendu à 500.000 exemplaires et paru en 1986 (il y a un siècle
!).
Depuis cette date, j'ai animé 1.200 conférences et rencontré des dizaines de milliers de passionnés du service qui m'ont fait aimer ce sujet.
En savoir plus PBRH Conseil
http://www.journaldunet.com/management/0705/0705185-chat-hababou-services-client.shtml
Bon pour le service?
Service compris, sorti en 1986, avait défrayé la chronique. Ralph Hababou revient aujourd’hui avec Service gagnant, les secrets des entreprises qui créent la différence (édition First). Le service version 2007, une révolution présentée en exclusivité pour les lecteurs de Tribu.
Tribu : Comment expliquez-vous l’engouement suscité par Service Compris ?
Ralph Hababou :J’ai été le premier surpris par le succès de ce livre auquel personne ne s’attendait, je ne me l’explique toujours pas ! On peut penser qu’il s’agissait d’un bon produit sorti au bon moment. Le proverbe chinois d’ouverture « L’homme qui ne sourit pas ne doit pas ouvrir boutique » résume à lui seul toute la philosophie du commerce. Le service était perçu comme « la cerise sur le gâteau » : il suffisait de vendre de bons produits avec le sourire et d’assurer un service après-vente de qualité pour que les clients affluent. Le sous-titre du livre était d’une effroyable banalité mais reste toujours d’actualité : les clients heureux font les entreprises gagnantes.
T : Qu’est ce qui a changé en 20 ans ?
RH : La recette du succès s’est compliquée. Le client était roi, il est devenu un dictateur qui a clairement pris le pouvoir. Vendre un bon produit avec un bon service ne suffit plus. Pour être compétitif, il faut désormais comprendre exactement ce que veut le client et le prix qu’il est prêt à payer. Deux mots ont tout bouleversé : high-tech et low-cost.
Le premier facteur qui, tel un tsunami, a transformé et bouleversé aussi bien nos organisations que la relation au client est la révolution « high-tech » et l’émergence, dans toutes les facettes du business, d’Internet et des nouvelles technologies de l’information. Un exemple parmi des milliers : comment une agence de voyage traditionnelle, avec ses brochures imprimées six mois à l’avance, peut-elle encore lutter contre un site en ligne qui, outre des offres promotionnelles mises à jour en temps réel et des disponibilités immédiates, propose des vidéos et des visites virtuelles des hôtels et des lieux touristiques, ajuste ses prix en permanence en fonction du taux de remplissage (yield management) ?
L’autre phénomène intéressant et tout aussi dévastateur est le « low-cost ». Internet lui a permis de se développer en réduisant le nombre d’intermédiaires entre le producteur et le consommateur et en rendant l’information accessible au plus grand nombre. En janvier 2007, le constructeur automobile Peugeot a mis en vente 96 modèles 1007 avec un prix réduit sur le site vente-privée.com : en une seule journée, 61 voitures ont trouvé acquéreur. Les concessionnaires de la marque n’en sont toujours pas revenus. Dans tous les secteurs, il existe désormais une entreprise ou une offre low-cost qui tire les prix vers le bas.
Pour s’en sortir face à une telle concurrence, il faut soit vendre encore moins cher, ce qui n’est pas toujours possible, soit en donner plus pour justifier la différence de prix. En ayant toujours en tête qu’un mauvais service coûte toujours trop cher alors que certains clients sont prêts à payer pour bénéficier d’un vrai service et d’une assistance de qualité.
T : Ce que vous appelez le « phénomène de sablier » ?
RH : En effet, le point commun à toutes les entreprises qui veulent s’en sortir dans un contexte d’offre standardisée, banalisée et mondialisée face à une concurrence de plus en plus acharnée : la nécessité impérieuse de créer la différence. Deux solutions : créer la différence par le bas en baissant les prix, ou par le haut en misant sur l’innovation, les services ou le fait de donner du sens à l’acte d’achat (développement durable et commerce équitable).
L’évolution du critère prix devient une tendance lourde sur tous les marchés. La sensibilité au prix est très forte sur le bas des marchés et, à l’inverse, tout en haut, il y a une explosion des marques, des produits et des services de luxe pour lesquels la préoccupation prix disparaît ou s’atténue. D’autres valeurs prennent le dessus : le show off, le statut social, l’image, la valeur ajoutée, la simplicité, la rapidité, l’émotion, etc. Dans certains cas, et c’est aussi une nouveauté, les mêmes clients demandent des services à valeur ajoutée sur mesure et, sur certaines typologies de besoin, des produits basiques de type «low-cost». La technologie a bien aidé à rendre les prix encore plus transparents ; beaucoup de chefs d’entreprises paieraient cher pour voir disparaître les sites comparateurs de prix.
Le système d’achat était auparavant de type pyramidal : dès qu’il le pouvait, le client prenait le produit immédiatement plus cher. L’arbitrage se fait maintenant par le prix, vers le haut et vers le bas. Conséquence : les marchés s’effondrent globalement par le milieu. C’est une des nouvelles tendances du client identifiée parmi d’autres (Cf. encadré).
T : Dans ce contexte, comment se dessine l’avenir des entreprises françaises ?
HB : Une première remarque avec cette célèbre phrase d’un patron allemand : « Demain, ce ne sont pas les gros qui vont manger les petits mais les rapides qui vont manger les lents ». Je déplore de rencontrer de nombreuses entreprises qui continuent à piétiner dans l’ordre au lieu d’avancer, et tant pis si c’est un peu dans le désordre. Combien de magnifiques réunions où des tas de gens intelligents réfléchissent au lieu d’agir et font tout pour éviter l’échec. Ceux qui n’ont jamais connu d’échec ne sont pas les plus brillants, ce sont simplement ceux qui n’ont jamais pris le moindre risque.
C’est dommage, car nos entreprises sont les mieux armées pour créer la différence par le haut. La France possède la capacité d’innover : le talent, l’imagination et la créativité. Nous ne serons jamais les champions du low cost, mais plutôt les entreprises germaniques (Lidl, Aldi, etc.) ou anglo-saxonnes (Ryanair, Easyjet, etc.) qui mènent la danse dans ce secteur. Le facteur humain y est réduit au minimum et les patrons n’ont aucun état d’âme pour réduire les coûts et parvenir à vendre toujours moins cher.
Au lieu de nous plaindre des conditions sociales auxquelles nous sommes habituées et que personne ne songe aujourd’hui à remettre en cause, utilisons-les comme un levier pour demander à nos collaborateurs de donner le meilleur d’eux-mêmes, d’en faire plus et de mettre tout leur talent au service du client. C’est la méthode la plus sûre pour défendre notre emploi face aux indiens et chinois qui ne demandent qu’à récupérer les jobs de nos enfants. Un exemple : nous avons le meilleur produit du monde en matière touristique puisque la France est la première destination mondiale. Pourtant, combien de serveurs dans les restaurants parlent encore mal l’anglais ou d’hôteliers qui continuent de proposer aux touristes asiatiques un café-crème avec croissant le matin alors qu’ils préfèrent déguster une soupe ?
En investissant ne serait-ce que 10% de l’énergie consacrée actuellement à tailler dans les coûts, à améliorer l’accueil et le service au client, le résultat de nombreuses entreprises en serait tout simplement transformé.
T : Que devient la fonction commerciale ?
RH : En matière de service au client, les fonctions de base sont assurées : dans l’entreprise, on sait aujourd’hui dire au client Bonjour, Au revoir et Merci. La nouvelle frontière du service au client sera de réapprendre à vendre.
Le client a tout loisir de prendre des renseignements ou recueillir des informations en consultant tranquillement, à partir de son ordinateur, les innombrables sites, blogs, comparateurs de prix et autres forums sur Internet. En revanche, quand il arrive dans un magasin ou vous contacte par téléphone, il ne souhaite qu’une seule chose : rencontrer un vrai professionnel, le meilleur des meilleurs, quelqu’un qui sache vendre, séduire et convaincre, qui connaisse parfaitement le produit et sache en parler avec talent, qui comprenne ses besoins. En d’autres termes : arrêter de vendre et donner envie d’acheter.
Le client ne supportera plus de perdre son temps ou d’avoir en face quelqu’un d’incompétent, qui en sait moins que lui ou, pire, qui ne sait pas vendre. Cette nouvelle exigence du client aura inévitablement des conséquences sur la formation, le professionnalisme et le comportement des vendeurs de demain.
D’ailleurs, la fonction commerciale évolue pour intégrer et gérer l’ensemble de la relation clients, de l’amont (la définition des offres) à l’aval (le service après-vente). La séparation entre le marketing et les ventes ne sera bientôt plus qu’un lointain souvenir. Dans un univers où la technologie aura pris le relais sur ce qui apporte une faible valeur ajoutée au client, le contact avec un commercial reste essentiel pour le convaincre, le rassurer et humaniser la relation.
T : Un dernier mot ?
RH : Juste pour vous citer la phrase de Jean Giono qui ouvre Service gagnant et qui, pour moi, résume mieux qu’un long discours le choix auquel nous sommes confrontés : «Nous voulons de la place au soleil - c’est normal mon garçon ; alors, fais du soleil au lieu de chercher à faire de la place».
http://www.dcf-france.fr/139-consommation