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Knock on Wood

La France d'après ou la France sous nos yeux ?

3 Mars 2022 , Rédigé par Ipsus Publié dans #Dans L'AIR DU TEMPS

 

On a beaucoup entendu parler de " la France d'après " & même de la "France à 2 vitesses " 

Après l'ARCHIPEL français (2019) l'auteur nous livre son analyse sur

la " France sous nos yeux " 

Jérôme Fourquet :

"La France d’après est profondément transformée, et fortement hybridée

.....(29.9.2021 _DUREE : 13.35 mn)

Qu'ont donc en commun les plateformes logistiques d'Amazon, les émissions de Stéphane Plaza, les restaurants de kebabs, les villages de néo-ruraux dans la Drôme, l'univers des coaches et les boulangeries de rond-point ?

Rien, bien sûr, sinon que chacune de ces réalités économiques, culturelles et sociales occupe le quotidien ou nourrit l'imaginaire d'un segment de la France contemporaine.

Or, nul atlas ne permet de se repérer dans cette France nouvelle où chacun ignore ce que fait l'autre.

L'écart entre la réalité du pays et les représentations dont nous avons hérité est dès lors abyssal, et, près d'un demi-siècle après l'achèvement des Trente glorieuses, nous continuons à parler de la France comme si elle venait d'en sortir.

Pourtant, depuis le milieu des années 1980, notre société s'est métamorphosée en profondeur, entrant pleinement dans l'univers des services, de la mobilité, de la consommation, de l'image et des loisirs.

C'est de la vie quotidienne dans cette France nouvelle et ignorée d'elle-même que ce livre entend rendre compte à hauteur d'hommes et de territoires.
Le lecteur ne s'étonnera donc pas d'être invité à prendre le temps d'explorer telle réalité de terrain, telle singularité de paysage ou telle pratique culturelle, au fil d'un récit soutenu par une cartographie originale (réalisée par Mathieu Garnier et Sylvain Manternach) et des statistiques établies avec soin.

Qu'ils fassent étape dans un parc d'attraction, nous plongent dans les origines de la danse country, dressent l'inventaire des influences culinaires revisitées, invoquent de grandes figures intellectuelles ou des célébrités de la culture populaire, les auteurs ne dévient jamais de leur projet : faire en sorte qu'une fois l'ouvrage refermé, le lecteur porte un regard nouveau sur cette France recomposée.

Jérôme Fourquet, auteur de L'Archipel français (Seuil, 2019), est analyste politique, expert en géographie électorale, directeur du département Opinion à l'IFOP.
Jean-Laurent Cassely est journaliste (Slate.frL'Express) et essayiste, spécialiste des modes de vie et des questions territoriales.

.....Comme ils le disent en introduction : « ce livre a pour ambition de dresser un tableau d’ensemble de la France d’après. D’après la métamorphose qui s’est produite depuis le milieu des années 1980 jusqu’à la fin des années 2010. L’année 2020-2021, celle de la crise sanitaire, n’aura fait que révéler, accélérer et bien souvent hystériser des transformations qui s’étaient engagées de longue date ». Ces 40 années ont vu le paysage de la France complètement chamboulé, sans que nos responsables politiques successifs, de droite ou de gauche, en aient réellement pris conscience et donc sans que les adaptations qui s’imposaient aient été encouragées voire entreprises. Le chamboulement majeur, absolument déterminant, parfaitement argumenté avec force chiffres et exemples à l’appui, est le suivant : « Le passage d’un système économique organisé et pensé autour des activités de production à un modèle centré sur la consommation, le tourisme et les loisirs ». Voici 9 constats, choisis parmi la multitude des analyses que contient La France dans les yeux, qui illustrent ce basculement.
....( 10.6.2021_DUREE : 6 mn)
...( octobre 2021 ) Jérôme Fourquet & Jean-Laurent Cassely vous présentent leur ouvrage "La France sous nos yeux : économie, paysages, nouveaux modes de vie" aux éditions Seuil. Entretien avec Jean Petaux.( DUREE : 1h29 mn )
La France d'après ou la France sous nos yeux ?
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La France d'après ou la France sous nos yeux ?
La France d'après ou la France sous nos yeux ?

J’ai lu avec beaucoup d’intérêt le nouvel opus de Jérôme Fourquet La France sous nos yeux (Seuil, 2021).

Ecrit avec le journaliste Laurent Cassely, Michel Houellebecq et Nicolas Mathieu inspirant la toile de fond, il nous emmène dans la nouvelle réalité française qu’il appelle « la France d’après », la France d’après la « Grande Transformation » commencée dans les années 1990, marquée par cinq mouvements de fonds.

La transformation du modèle économique français avec la désindustrialisation et la spécialisation dans les services d’abord.

La modification du territoire productif et résidentiel ensuite avec la métropolisation et la littoralisation de l’habitat.

Le tout porté par la redistribution sociale dans l’espace français avec des aires concentriques autour des villes regroupant des catégories de population assez homogènes (bourgeoisie traditionnelle et bourgeoisie bohème à l’intérieur des villes, milieux populaires et classes moyennes déclassées repoussées à la périphérie des agglomérations, les immigrés restant à l’intérieur ou à proximité des grandes villes).

L’évolution de la stratification sociale est le 3è point clé avec une amélioration générale du confort de vie (moyennisation) et une polarisation concomitante qui rend difficile la lecture de l’évolution de la société française : la progression générale des conditions est masquée par la hausse des inégalités et le sentiment de déclassement d’une partie importante de la population.

Nouvelle hiérarchie.

Ces évolutions créent une nouvelle hiérarchie des emplois : c’est la quatrième transformation.

Pour rendre possible la société de services qu’est devenue la France, il faut des petits emplois, pas chers, flexibles, mini-jobs à la française mal payés qui permettent de répondre aux rêves du service juste-à-temps et de l’économie du bien-être.

Le tout, dans un contexte idéologique d’anomie extrême, le catholicisme ayant disparu des consciences (1,5 % de messalisants chaque semaine), il est remplacé par les coachs spécialistes en développement personnel, la culture américaine, le patchwork identitaire, régionaliste ou religieux et le yoga qui fait de plus en plus d’adeptes.

Il manque trois composantes à ce livre : les retraités , les immigrés et l’extrême droite.

   1) Les retraités car on ne comprend pas le nouveau modèle économique si on élude l’extraordinaire déplacement de richesse en quarante ans des actifs vers les retraités et le choix de la rente faits collectivement par des dirigeants et des baby-boomers bien décidés à rester jusqu’au bout une génération dorée et égoïste qui laisse à ses enfants une dette climatique et financière insoutenable. 

   2) Les immigrés sont également invisibles dans le livre : c’est pourtant eux qui permettent à cette économie de service de prospérer en occupant les emplois de la logistique, de la restauration, des transports et des services à la personne.

   3) L’extrême droite enfin, si présente en ce moment dans le débat politique via sa nouvelle figure tutélaire, Eric Zemmour , qui se fait l’historien révisionniste et amateur de la France d’avant, que le livre montre en décalage total avec cette France sous nos yeux. Bonne nouvelle donc : Zemmour, Le Pen et consorts sont très loin du pays réel, ils vont perdre la bataille. Mais leur haine pour la France d’aujourd’hui laissera des traces.

Hakim El Karoui est associé senior chez Brunswick et chercheur associé à l’Institut Montaigne.

( 28.10.2021 ) C’est une somme de 500 pages, mais après l’avoir refermée, on a l’impression d’un peu mieux connaître la France, son «économie», ses «paysages» et ses «modes de vie», pour reprendre le sous-titre de la France sous nos yeux.

Ecrit à quatre mains par le directeur du département Opinions de l’Ifop, Jérôme Fourquet, et le journaliste pour Slate.fr et l’Express, Jean-Laurent Cassely, ce livre nourrit l’ambition de «dresser un tableau d’ensemble de la “France d’après”» l’industrie, l’aménagement planifié du territoire et la grande classe moyenne.

Deux ans après l’Archipel français, qui témoignait de «l’archipellisation» de la société française, il s’agit cette fois de documenter la «Grande Métamorphose» subie par le pays depuis le milieu des années 80. Soit le «passage d’un système économique organisé et pensé autour des activités de production à un modèle centré sur la consommation, le tourisme et les loisirs».

Les sources sont multiples, et c’est ce qui fait la richesse de cette enquête : à côté de cartes et graphiques très parlants, ainsi que d’éclairantes monographies de territoire, les auteurs ont puisé dans la culture populaire (émissions de TV, films, magazines people) mais aussi dans la presse, la photographie et la littérature, pour tenter d’identifier les modes de vie, goûts et nouveaux métiers des Français. Revue non exhaustive :
Les villages de marque. En une vingtaine d’années, la France s’est transformée en une «gigantesque zone de chalandise». Premier employeur du pays, la grande distribution structure l’organisation spatiale comme autrefois les foires et marchés : on compte un Intermarché tous les 17 km ! Une nouvelle pratique a vu le jour : le tourisme commercial dans ces «parcs à thème dédiés à la consommation» avec leur esthétique parodiant l’architecture de la région où ils sont implantés. Marques Avenue, The Village, La Vallée Village : la trentaine d’outlets situés en entrée de ville ou à la confluence de flux entre plusieurs agglomérations illustre cette nouvelle fonction du territoire comme «support de consommation». Et offre un «lot de compensation» à cette France périphérique où l’industrie s’est fait la malle, et l’entrepôt Amazon a remplacé l’usine.
L’effet Ryanair. «Je n’ai pris l’avion que deux fois dans ma vie, avec Ryanair», témoignait Ingrid Levavasseur, l’une des figures des Gilets jaunes. Les compagnies low-cost n’ont pas seulement démocratisé l’avion, elles ont aussi dopé la fréquentation touristique des villes moyennes, désormais reliées à un large éventail de destinations étrangères. Ryanair et EasyJet ont remplacé la Datar (Délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale) qui, en irriguant la France par le TGV, avait laissé de côté des régions entières.
«Quand les pandas surclassent Chambord.» Il n’y a pas que Disneyland Paris, première destination touristique d’Europe et locomotive économique de l’Ile-de-France. Le zoo de Beauval, dans le Loir-et-Cher, est aussi devenu un must de la société de loisirs. Surtout depuis l’arrivée en 2012 d’un couple de pandas prêté par le gouvernement chinois : la fréquentation du site a alors dépassé le château de Chambord, joyau du département. Tout comme Disneyland Paris surclasse nettement le musée du Louvre ou le château de Versailles.
«Je rêve de Biarritz en été.» Roche, le tube de Sébastien Tellier sorti en 2009, témoigne de l’engouement pour Biarritz, que le New York Times a qualifié en 2013 de «Californie française». Nouvel eldorado de l’élite culturelle selon les deux auteurs, la station balnéaire de la côte basque connaît une flambée immobilière. Avec pour effet de ringardiser la trop bling-bling Côte d’Azur et jusqu’au Luberon, longtemps au palmarès de la «France désirable». Un indicateur de ce «déplacement de la frontière du cool culturel» ? Les ventes du magazine Maisons Côté Ouest talonnent désormais celles de Maisons Côté Sud. Sans surprise, Maisons Côté Est peine à décoller : il y a la France «triple A», selon les deux auteurs, et la «France moche», comme avait titré Télérama, selon l’impitoyable «hiérarchie des territoires» qui partage désormais l’Hexagone.
La «greentrification». En parallèle à la gentrification de la banlieue, étudiée dans un chapitre consacré à Pantin, en Seine-Saint-Denis, se produit une gentrification rurale. Terre d’élection des télétravailleurs parisiens adeptes de la «bi-résidence» depuis le confinement, le Perche, à 2h20 de Paris selon Waze, l’illustre jusqu’à la caricature. Reste à savoir si tous les territoires ruraux bénéficieront de la redistribution des cartes engendrées par la crise du Covid-19. Deux conditions : une bonne desserte, si possible ferroviaire (on peut y travailler), et le haut débit, la fibre optique jouant le rôle de «TGV du XXIe siècle».
Les néo-néo-ruraux. Si la «greentrification» concerne une élite urbaine, une «nouvelle vague néo-rurale» arrive dans les campagnes, comme le montre l’exemple de la Drôme, en passe de devenir «l’une des capitales des candidats à l’exode urbain». Après les babas cools des années 70 et les marginaux des années 1990-2000, une nouvelle génération de militants décroissants, chassée des grandes villes par la flambée des prix de l’immobilier, a opéré un «grand virage pastoral». Un phénomène qui illustre, pour les auteurs, la «lutte des places» qui se produit sur tout le territoire : «La génération qui a grandi dans la France des années 2000 se heurte aux limites de la gentrification urbaine : les morceaux encore disponibles sont constitués de zones trop éloignées, trop mal desservies» ou «dotées d’écoles de mauvaise réputation».
«Le mode de vie Plaza majoritaire.» Le tollé suscité par la sortie d’Emmanuelle Wargon sur la maison individuelle avec jardin est venu le rappeler : ce modèle est non seulement majoritaire dans les faits (56% du parc français est constitué de logements individuels) mais aussi dans les têtes. Car vivre dans le périurbain est un choix de vie – plébiscité par plus des deux tiers des Français, selon les sondages. A mi-chemin entre la France «triple A» et les banlieues reléguées, de vastes territoires pavillonnaires ont vu s’épanouir un mode de vie particulier que les auteurs ont baptisé «Plaza majoritaire», clin d’œil à l’agent immobilier Stéphane Plaza et à sa célèbre émission sur M6. Un mode de vie qui suppose d’avoir une voiture (ou deux) et qui valorise la déco intérieure. Avant, on avait raté sa vie si on n’avait pas une belle bagnole. Aujourd’hui, la norme diffusée par Plaza et son équipe de décoratrices est la cuisine ouverte et son îlot central, le salon avec canapé et téléviseur à écran plat, la suite parentale avec douche à l’italienne…. et double vasque pour chaque membre du couple.
Autre équipement totem de la maison individuelle, le barbecue, auquel les auteurs consacrent plusieurs pages passionnantes (mais si !), et la piscine, devenue la norme dans la moitié sud du pays. Le bassin privé n’a pas seulement une fonction rafraîchissante : c’est un marqueur social, qui permet de «contourner la piscine municipale, mais aussi la plage dont le public est composé par définition d’une population qu’on ne choisit pas». A rebours du mode de vie qui valorise la mixité et le «droit à la ville».
La Dacia. Selon Fourquet et Cassely, la classe moyenne se «démoyennise», à la fois «par le haut et par le bas». Et la société française ressemble désormais plus à un sablier qu’à une toupie. D’un côté, on assiste à une «premiumisation des offres destinées aux classes moyennes supérieures», comme le montre l’exemple des stations de ski, devenues une destination de luxe après plusieurs décennies de démocratisation des sports d’hiver. De l’autre, à l’apparition d’un second marché et d’une «économie de la débrouille», illustrant «le désarrimage progressif du bas des classes moyennes». C’est la France du hard-discount, des bons plans et des vide-greniers, qui s’équipe chez Gifi et sur le Bon Coin. Qui achète au quotidien des MDD (marques de distributeurs) mais se rue sur le Nutella quand il est en promo (les auteurs rappellent les «émeutes du Nutella» de janvier 2018). La France qui roule en Dacia, la low-cost de Renault fabriquée en Roumanie, qui pratique les «cars Macron» ou Blablacar plutôt que le TGV. La France, enfin, qui souscrit des crédits à la conso et joue au loto. Forte de 30 500 points de vente répartis sur tout le territoire, la Française des Jeux «remplit une fonction sociétale déterminante». Triste constat : en vingt ans, son chiffre d’affaires a quasiment triplé, passant de 6,5 à 17,2 milliards d’euros.
La danse country. C’est la découverte la plus frappante de cette enquête : pas moins de 9% de la population française pratique cette danse dans le cadre d’un club ou d’une association. Pourtant, cette activité, très répandue dans les couches populaires, est ignorée des médias. Un signe de plus, selon les auteurs, des «fractures socioculturelles» à l’œuvre. En plus de la couche yankee, de nouvelles strates se sont ajoutées au «millefeuille culturel français», comme en témoignent le succès du tacos, la mode de la chicha ou la diffusion de la culture nipponne (sushis et mangas, Japan Expo). Mais si la France a changé, le «steak frites» demeure, lui, indémodable. Comme Jean-Jacques Goldman. Ouf !
Eve Szeftel

L'analyste politique Jérôme Fourquet et le journaliste Jean-Laurent Cassely analysent, dans leur livre « la France sous les yeux », les évolutions de la société française, bouleversée par l'effondrement de l'agriculture et de l'industrie et de plus en plus fragmentée.

Ils nous font visiter un patchwork hexagonal qui va des villages de marques aux néoruraux de la Drôme en passant par la France des kebabs et celle des entrepôts Amazon.

Christelle Bertrand
Dans cet ouvrage, vous avez tenté de décrire la France d'aujourd'hui, quel était votre objectif ?
L’objectif était double, le premier était de raconter ce que nous avons appelé la grande métamorphose, c’est-à-dire les transformations très profondes que le pays a connues depuis le milieu des années 80 et montrer au public en quoi cette France qu'il a sous les yeux s’est transformée de manière assez spectaculaire. Et le deuxième objectif était de dresser une cartographie sociologique, géographique et culturelle de la société contemporaine, ce que l'on a appelé la France d’après, qui a résulté de cette grande métamorphose.
Vous décrivez les vides laissés par la chute du secteur primaire puis secondaire. L'explosion du tertiaire les comblent-ils ?
Depuis les années 80, l'une des mutations majeures est le passage d'une économie organisée autour de la production, qu'elle soit industrielle ou agricole, à une économie qui est centrée sur la consommation, le tourisme et les loisirs avec comme dernier secteur, celui de la logistique. L'usine a été remplacée par l’entrepôt Amazon. Est-ce que ces transformations ont permis au tertiaire de combler le vide existant ? Certes le tertiaire a créé énormément d'emplois mais on peut s’interroger sur la qualité de ces emplois, sur les perspectives de carrière et de promotion qu'ils offrent. Et d'autre part, on peut aussi constater que l'industrie et l'agriculture avaient, comme atouts et avantages, la capacité à s’être développées un peu partout sur le territoire et pas uniquement dans les zones touristiques ou les grandes métropoles ce qui n’est pas le cas du tertiaire. En termes de qualité des emplois, en termes d'emménagement du territoire, le tertiaire ne comble donc pas les vides, pas plus qu'en termes de sociabilité. On a tout un chapitre sur ce qui a gravité autour du monde de l'usine comme les cités ouvrières, les clubs de sport, tout ça s'est effondré avec la disparition de ce monde et n'a que très partiellement été remplacé par le secteur tertiaire.
Vous faites un tableau des nouveaux métiers pourvoyeurs d'emploi (employé logistique, d'Hepad, femmes de ménage, VTC) et vous décrivez une absence de conscience de classe. Génère-t-elle une forme d'individualisme ?
L’individualisme est partout présent dans la société française, il résulte, à la fois du déclin des grandes idéologies mais aussi de l'effondrement de ces mondes qui étaient très fortement intégrateurs comme le monde ouvrier, le monde paysan, le monde catholique. L’individualisme a énormément gagné de terrain dans ces catégories populaires ce qui s'est soldé par la disparition de cette conscience de classe et une forme d'émiettement de ces mondes populaires qui n'aide pas à leur représentation politique et symbolique puisque les syndicats sont très peu implantés dans ces milieux et il n'y a plus d'organisation comme le Parti Communiste a pu l'être ni de figures intellectuelles qui soient en capacité de représenter et porter les intérêts de ces groupes.
Ces salariés ne votent plus comme les prolétaires d'hier, ils votent quoi?
Beaucoup s'abstiennent, on en a eu un certain nombre de témoignages lors de la crise des Gilets jaunes. Une autre part, non négligeable, vote pour le Rassemblement National.
Vous vous attelez aussi à décrire une France très diverse au niveau culturel. Vous nous faites visiter un patchwork qui va de la culture américaine à la passion française pour les mangas et les sushis en passant par la France des kebabs. La culture française est-elle en recul ?
La culture française traditionnelle très certaine mais ce à quoi on assiste c'est à l’émergence d'une nouvelle forme de culture qui est une culture hybridée qui intègre à la fois des héritages de notre histoire de longue durée, une très forte influence américaine et à côté une démultiplication de nombreuses influences étrangères.
Dans votre ouvrage, vous citez la Haute Garonne. Comment expliquez-vous la persistance d'une forte culture régionale (l'accent, la gastronomie, le rugby...) ?
Cette culture a été historiquement très ancrée, elle s’est construite assez fortement en opposition à la culture majoritaire qui était la culture de l’État central. Une série de chanteurs comme Cabrel ou Nougaro ont eu la volonté d'entretenir cette spécificité locale et je pense aussi que ce sont des régions qui ont été moins concernées que d’autre part le grand déménagement c’est-à-dire le très grand mouvement de population, d'une région à une autre, qui a contribué à homogénéiser les modes de vie et à effacer certaines spécificités régionales comme c'est le cas en région PACA. De plus, dans la région toulousaine, la connexion avec Paris par train à grande vitesse n'est toujours pas présente or, lorsqu’on regarde les travaux de Fernand Braudel sur l'identité de la France il insiste sur la distance à Paris en termes d'heure de transports. Ce sud-ouest intérieur a toujours été plus difficile à atteindre ce qui a sans doute contribué à ce que la culture régionale s'enracine davantage et résiste davantage qu'ailleurs à ce grand brassage.
Ce métissage de la culture française peut-il engendrer une forme de repli sur soi, un retour aux valeurs considérées comme françaises, de la part de ceux qui en sont exclus  ?
Effectivement, lorsque l'on observe le caractère extrêmement rapide des mutations culturelles que le pays a connu, on peut comprendre qu'une partie de la population se sente un peu déroutée et aspire à préserver un héritage. Ça peut prendre des formes diverses comme une certaine nostalgie face à une époque comme celle des 30 glorieuses. Sur le plan politique, cela peut contribuer à produire un terreau sur lequel une offre politique comme celle d’Eric Zemmour peut prospérer.
Quelles leçons politiques peut-on en tirer ?
Nous restons à notre place, nous ne sommes que des analystes mais le but de ce livre est de participer à une actualisation des grilles de lecture. À l'heure où les responsables politiques vont proposer des projets pour la France, il faut qu'ils aient la possibilité de poser un diagnostic qui ne soit pas hors sol. On a une espèce d'image rétinienne qui nous ramène toujours à la France des trente glorieuses. Pour en revenir à la question du début qui était : est-ce que le tertiaire suffit à combler les vides, la réponse est non. Le débat sur la réindustrialisation de la France est important. On voit aussi à quel point la question des modes de vie devient un enjeu politique aujourd’hui. J'en veux pour preuve la question de la place de la voiture, de l'avenir du transport aérien ou des menus dans les cantines. La mairie écolo de Lyon, par exemple, a retiré les cordons-bleus des cantines parce qu’il est le symbole d'une nourriture trop transformée. Ces mutations de mode de vie sont à prendre en compte dans la perspective du prochain scrutin. Aujourd’hui, on a deux grandes inquiétudes qui taraudent la société française : d'un côté le grand réchauffement et de l’autre la hantise du grand remplacement. Dans les deux cas, cela produit un sentiment d'urgence car c'est la survie même du pays ou de la civilisation qui est en jeu.
Propos recueillis par Christelle Bertrand
La France d'après ou la France sous nos yeux ?
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