American Airlines a annoncé s’attendre désormais à ce que le Boeing 737 MAX reste hors service jusqu’en janvier. C’est la dernière illustration en date des coûts supplémentaires et des contraintes logistiques pour les transporteurs et les passagers que continue à générer l’avion immobilisé au sol.

Selon la planification de la production de Boeing, la flotte mondiale d’appareils MAX devait avoisiner le millier d’ici à la fin de l’année avant son immobilisation en mars à la suite de deux crashs mortels.

Aujourd’hui, les compagnies qui exploitent le MAX paient des millions de dollars pour entretenir des avions cloués au sol et ajuster leurs activités au fur et à mesure que la suspension de vol s’étire. Les analystes estiment qu’environ trois millions de passagers auront vu leurs déplacements perturbés si la flotte reste immobilisée jusqu’à la fin de l’année.

Mercredi, American Airlines a déclaré désormais prévoir la remise en service de sa flotte MAX le 16 janvier, soit plus d’un mois après sa prévision précédente. United Airlines a, lui, toujours ses MAX inscrits à son planning de décembre.

Certains transporteurs suppriment l’appareil de leurs réservations pour l’été prochain au cas où la flotte MAX globale resterait limitée. Des leaders du secteur — dont Michael O’Leary, CEO de Ryanair —, affirment que la situation allait probablement entraîner une hausse des prix durant cette période de grande affluence.

Les compagnies aériennes ont compensé environ la moitié de la perte de capacité disponible en louant des avions et en reportant la mise au rancart d’anciens appareils. Selon l’Association internationale du transport aérien, la diminution des capacités a contribué à porter le pourcentage de sièges occupés sur les vols internationaux à des sommets inégalés en juillet et août. Le nombre de passagers ne trouvant pas de places sur des avions surbookés est en augmentation.

Les transporteurs paient pour recaser leurs passagers et rémunèrent des équipages inactifs alors qu’ils passent à côté des gains tirés des vols annulés. Certains analystes estiment que les coûts quotidiens associés à chaque MAX cloué au sol peuvent aller jusqu’à 150 000 dollars pour certaines compagnies. Cela comprend la location des appareils de remplacement, les coûts financiers relatifs aux avions immobilisés, les dépenses d’équipage et les logements destinés aux passagers.

L’immobilisation au sol du MAX coïncide avec d’autres problèmes opérationnels pour les grands transporteurs, comme le conflit avec les mécaniciens qui, selon American Airlines, a obligé à annuler des centaines de vols. Southwest Airlines assure que le manque d’avions disponibles a contribué à accélérer sa décision d’arrêter ses activités sur l’aéroport international de Newark-Liberty, où il avait du mal à gagner de l’argent.

Une partie de la diminution des capacités disponibles causée par le maintien au sol de la flotte de MAX est compensée par une modération de la demande au niveau des passagers et du fret, une première depuis des années. Le trafic passagers a augmenté de 3,6 % en juillet par rapport à l’année précédente, soit une hausse moitié moindre que son rythme moyen des deux dernières années, le ralentissement de la croissance économique et les tensions commerciales ayant pesé sur le secteur. Si la croissance de la demande avait suivi son rythme des années précédentes, les prix auraient probablement augmenté, affirment certains analystes.

Boeing a provisionné une somme initiale de 5,6 milliards de dollars afin de dédommager ses clients pour les avions cloués au sol et ceux qui n’ont pas été livrés. Le géant de l’aérospatiale affirme qu’il s’attend à ce que le MAX soit, de nouveau, autorisé à voler par les organismes de réglementation au cours du quatrième trimestre, s’il obtient l’habilitation réglementaire dans les prochaines semaines.

Des désaccords entre organismes de régulation de la sécurité aérienne américain et européen au sujet de certains éléments des corrections proposées sur les systèmes de contrôle de vol du MAX pourraient entraîner un allongement des délais avant que l’avion soit à nouveau autorisé à voler, a révélé mardi The Wall Street Journal.

Vasu Raja, vice-président du réseau et du planning de programmation chez American, déclare que l’immobilisation a créé l’un des problèmes de programmation les plus complexes des deux dernières décennies. American Airlines exploitait 24 appareils MAX en mars et prévoyait d’en voir seize de plus débarquer d’ici à la fin de l’année.

La compagnie aérienne a modifié sa programmation plus d’une demi-douzaine de fois depuis que le MAX a été interdit de vol en mars. Le transporteur a ajouté du personnel dans ses centres de service à la clientèle afin de traiter les appels des passagers qui vérifiaient si leurs vols étaient touchés.

American déclare qu’il allait s’efforcer de minimiser l’impact sur les voyageurs pendant les vacances.

Certains voyageurs ont déjà vu leurs voyages bouleversés par l’absence des 737 MAX.

Au printemps dernier, Frank Muto avait réservé le voyage de sa famille à Disney World fin octobre. En juillet, Southwest lui a envoyé un courriel lui indiquant que le vol de retour était annulé et que la seule autre possibilité avec un vol direct faisait décoller sa famille six heures plus tôt que prévu. Cela signifiait qu’elle manquerait la majeure partie de son dernier jour sur son lieu de villégiature, ce qu’elle avait déjà payé. Il explique que les agents du service clientèle lui ont dit que ce changement était dû à l’immobilisation du MAX.

« Boeing leur a fourni un produit de qualité inférieure, et qui en souffre ? Tous les clients » lance M. Muto. Il a annulé son vol retour et réservé des billets sur American pour revenir à Philadelphie.

Un porte-parole de Southwest affirme que la compagnie a essayé de trouver des solutions de rechange acceptables pour le plus grand nombre de passagers possible, car elle a diminué son nombre de vols pour tenir compte de la réduction de sa flotte.

Certains exploitants américains du MAX ont recalibré leurs vols au lieu de louer des avions de remplacement, ce qui a contribué à une augmentation du nombre de refus d’embarquement. Ce chiffre a plus que quintuplé chez American au deuxième trimestre par rapport à l’année dernière, la compagnie ayant été pénalisée par l’immobilisation ainsi que par le conflit avec ses mécaniciens. Cet indicateur a plus que doublé chez Southwest, le plus grand exploitant de MAX, qui a invoqué les appareils cloués au sol.

American a déclaré mercredi que l’immobilisation avait conduit à l’annulation de 9 475 vols au troisième trimestre et avait diminué les bénéfices avant impôts de 140 millions de dollars. Southwest avait assuré que l’impact se chiffrerait à 175 millions de dollars au deuxième trimestre. Les deux compagnies ont dit que leurs coûts allaient augmenter à mesure que la date de livraison des dizaines d’autres appareils commandés serait repoussée.

En septembre, Icelandair a déclaré avoir conclu un accord avec Boeing pour couvrir « une fraction » des 140 millions de dollars de frais — qu’il a annoncés jusqu’à présent — dus à l’immobilisation de ses six MAX et les retards dans la livraison de dix autres. Le sud-africain Comair a, lui, affirmé que l’immobilisation de son unique MAX lui avait coûté 13 millions de dollars jusqu’à septembre.

Southwest, comme d’autres transporteurs, discute avec Boeing d’un règlement possible pour couvrir les coûts liés à l’immobilisation.

Les pilotes de la compagnie disent que l’interdiction leur a coûté de l’argent en raison de la diminution des possibilités de vol. Leur syndicat poursuit Boeing en justice, demandant plus de 100 millions de dollars d’indemnisation. Le mois dernier, le PDG de Southwest, Gary Kelly, a affirmé à ses employés que la compagnie aérienne veut partager le produit d’une éventuelle