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Knock on Wood

Léonard de Vinci : Book Talk with Walter Isaacson on “Leonardo Da Vinci”

20 Octobre 2019 , Rédigé par Ipsus Publié dans #Sciences & Techniques, #Dans L'AIR DU TEMPS, #Histoire & Archeologie

Léonard de Vinci : Book Talk with Walter Isaacson on “Leonardo Da Vinci”
Léonard de Vinci : Book Talk with Walter Isaacson on “Leonardo Da Vinci”
Léonard de Vinci : Book Talk with Walter Isaacson on “Leonardo Da Vinci”
Léonard de Vinci : Book Talk with Walter Isaacson on “Leonardo Da Vinci”
Léonard de Vinci : Book Talk with Walter Isaacson on “Leonardo Da Vinci”
Léonard de Vinci : Book Talk with Walter Isaacson on “Leonardo Da Vinci”
Léonard de Vinci : Book Talk with Walter Isaacson on “Leonardo Da Vinci”

Par sa capacité à exceller dans le domaine artistique autant que dans les sciences et techniques, Léonard est un bon exemple de l'universalisme de l'homme de la Renaissance : un individu qui s'intéresse à toutes les dimensions du savoir et qui établit des ponts entre les différentes disciplines. Comme le remarque Isaacson, Léonard « se considère autant comme un artiste que comme un scientifique et un ingénieur ».

Sa curiosité insatiable est à la source de sa créativité. Autodidacte, ce n’est pas un génie doté d’une intelligence hors norme. Il ne fait pas d’études prestigieuses et peut à peine lire le latin ou résoudre des équations mathématiques. Paradoxalement, la force de Léonard réside dans ce manque d’éducation formelle. Pour compenser cette faiblesse, il apprend à aiguiser son sens de l’observation et à expérimenter en permanence. Son côté marginal (Léonard est un enfant illégitime, homosexuel, gaucher et végétarien) fait également sa force. Il assume sa différence et échappe à la carrière de notaire qui lui aurait été imposée s’il avait été le fils légitime de son père.

Pragmatique, il recherche la protection des puissants pour pouvoir exercer son art en toute liberté : Ludovic Sforza à Milan, César Borgia à Florence, puis François Ier en France, seront ses principaux mécènes.

Journaliste et professeur d’histoire, Isaacson se passionne pour les grands innovateurs de l’Histoire et a notamment publié des biographies d’Albert Einstein et de Steve Jobs. Pour sa biographie de Léonard de Vinci, il s’est plongé dans les plus de 7 000 pages de notes griffonnées dans divers carnets remarquablement conservés. Les nombreuses illustrations qui jalonnent l’ouvrage en sont d’ailleurs souvent extraites. Elles permettent de pénétrer de manière parfois presque « intime » dans les pensées du maître.

Outre les carnets et croquis, Isaacson présente une analyse détaillée de nombreuses peintures de Léonard. Il offre une interprétation très convaincante de plusieurs œuvres majeures, y compris lorsqu’il tente de percer les nombreux mystères de La Joconde. Son analyse comparée de deux versions de La Vierge aux rochers est également très intéressante. Concernant la célèbre peinture murale de La Cène à Milan, Isaacson se distancie de l’interprétation de Kenneth Clark, auteur d’une autre biographie de référence sur Léonard de Vinci publiée en 1939. Il utilise cette œuvre pour illustrer le lien entre les différents talents de Léonard :

La mise en scène artificielle de La Cène, avec ses mouvements outranciers, sa perspective astucieuse et la théâtralité des gestes de ses personnages, porte la marque de l’expérience de Léonard en tant qu’imprésario et organisateur de spectacles de la cour.

Isaacson accorde enfin une place importante aux œuvres non achevées comme L’Adoration des Mages, Saint Jérôme et La Bataille d’Anghiari. La tendance de Léonard à la procrastination est vue comme un corollaire de sa curiosité permanente et de son perfectionnisme, plutôt que comme un signe de fainéantise.

Au final, cette nouvelle biographie très bien documentée peut paraître excessivement longue (plus de 650 pages !) à ceux qui souhaitent juste en savoir un peu plus sur Léonard de Vinci. Mais pour tous ceux que la Renaissance fascine, l’effort en vaut la peine. Grâce à une structure chronologique complétée par plusieurs regroupements thématiques au sein des chapitres, le livre contient très peu de répétitions et le style de l’auteur est très agréable. Une lecture exigeante mais extrêmement enrichissante !

Le regard de l’Homme de Vitruve est intense, comme s’il s’observait dans un miroir. 

L’Homme de Vitruve de Léonard incarne un moment de l’Histoire où l’art et la science s’associent pour permettre aux esprits mortels de sonder les questions intemporelles sur leur identité et sur leur place dans le grand ordre universel.

Il symbolise aussi un humanisme idéal qui célèbre la dignité, la valeur et la rationalité de l’humain comme individu.

Dans ce cercle et ce carré, c’est notre essence que nous percevons à travers celle de Léonard de Vinci, nu entre terrestre et cosmique.

Léonard de Vinci : Book Talk with Walter Isaacson on “Leonardo Da Vinci”
Léonard de Vinci : Book Talk with Walter Isaacson on “Leonardo Da Vinci”

Dès 1490 environ, et durant plus de deux décennies, Léonard étudie, avec son application habituelle, le vol des oiseaux et la possibilité de créer des machines permettant à l’homme de voler.

L’intérêt de Léonard pour les machines volantes naît de sa participation à des spectacles. Du début de son apprentissage dans l’atelier de Verrocchio jusqu’à la fin de ses jours en France, il prend toujours autant de plaisir à en créer. Ses oiseaux mécaniques sont pour la première – et la dernière – fois utilisés pour amuser la cour2. Lors de diverses représentations théâtrales, Léonard découvre des mécanismes ingénieux permettant aux acteurs de monter, descendre et flotter dans les airs comme s’ils volaient.

 

 

Léonard produira deux versions similaires de ce tableau qui sera plus tard intitulé la Vierge aux rochers.

A gauche, ce dessin fascine parce qu’il est l’un des plus représentatifs du talent de dessinateur de Léonard. En quelques lignes et traits simples et inspirés, il parvient à créer un croquis à la fois concis et précis d’une beauté inégalée. L’esquisse captive au premier regard.

Sa sobriété apparente retient notre attention, nous invite à l’explorer en profondeur.

 

Les œuvres de Léonard contribuent au mystère qui entoure le personnage. C’est notamment le cas du Portrait d’un musicien (fig. 67) qu’il peint au milieu des années 1480.

Ce portrait d’homme, le seul de la main du maître à notre connaissance, n’apparaît pas dans les archives de l’époque. On ne sait pas bien qui est le sujet de ce tableau,

le portrait dépeint un jeune homme aux cheveux joliment bouclés (évidemment), représenté de trois quarts, tenant une partition pliée. Son torse, son gilet brun et ses mains ne sont pas terminés. Certaines parties de son visage semblent également privées des dernières couches que Léonard a l’habitude d’appliquer à ses œuvres.

 

Pope-Hennessy, historien de l’art du XXe siècle, le considère comme « le premier portrait moderne » et « la première peinture à introduire dans l’art européen l’idée qu’un portrait puisse exprimer les pensées de son sujet à travers sa posture et ses gestes».

Cecilia n’est pas représentée de profil, comme le veut la tradition à l’époque, mais de trois-quarts.

Son corps est tourné vers la gauche du tableau, mais sa tête est nettement orientée vers la droite, comme si son attention avait soudainement été attirée par quelque chose ou par quelqu’un – probablement Ludovic – se dirigeant vers elle depuis la source lumineuse du portrait.

L’hermine qu’elle tient dans ses bras semble également en alerte, les oreilles dressées.

 

Les expérimentations de Léonard avec l’ombre et la lumière sont visibles dans un autre portrait de femme datant de la même période, La Belle Ferronnière (fig. 69).

Il s’agit très probablement du portrait de Lucrezia Crivelli, maîtresse officielle de Ludovic après le mariage de Cecilia, un statut qui semble pourtant incompatible avec son rôle de dame d’honneur de Béatrice d’Este.

Comme Cecilia, Lucrezia donne un fils à Ludovic et se voit apparemment remerciée pour ce haut fait de la même manière que celle qu’elle remplace : avec un portrait de Léonard.

Le panneau de noyer sur lequel est peint le portrait semble provenir du même arbre que celui utilisé pour Cecilia.

 

Le 9 février 1498, Léonard de Vinci tient la vedette lors d’une soirée de débats au château des Sforza sur les mérites comparés de la géométrie, la sculpture, la musique, la peinture et la poésie.

En s’appuyant sur des arguments scientifiques et esthétiques, il défend rigoureusement la peinture, considérée alors comme un art mécanique, en faisant valoir que celle-ci devrait plutôt être reconnue comme la plus grande expression des arts libéraux, transcendant la poésie, la musique et la sculpture.

Le mathématicien de la cour, Luca Pacioli, qui participe aux débats pour arguer de la suprématie de la géométrie, relate que l’assemblée comprend des cardinaux, des généraux, des courtisans et d’« éminents orateurs, spécialisés dans les arts nobles ...

Léonard écrira de manière obsessionnelle sur l’ombre.

Il nous est parvenu un torrent de plus de 15 000 mots sur le sujet, pouvant remplir 30 pages d’un livre et représentant probablement la moitié de ce qu’il a originellement écrit. Ses observations, tableaux et diagrammes deviennent de plus en plus complexes (fig. 71 et 72). En usant de sa sensibilité pour les relations d’homothétie, il calcule les effets

 

 

 

Léonard de Vinci : Book Talk with Walter Isaacson on “Leonardo Da Vinci”

 

Il est important, écrit Léonard, de « reproduire le mouvement des membres d’une personne en adéquation avec les mouvements de l’âme de cette dernière ».

La Vierge à l’Enfant avec sainte Anne illustre ces propos. Marie étire son bras droit alors qu’elle essaie de contenir l’Enfant Jésus, faisant preuve d’un amour à la fois protecteur et délicat.

Cependant, l’Enfant Jésus semble bien décidé à batailler avec l’agneau car il met sa jambe autour du cou de l’animal et ses mains autour de sa tête. L’agneau, comme l’indique Fra Pietro, représente la Passion, le sort auquel Jésus ne pourra pas échapper.

 

Léonard entre au service de Borgia( 1502 ) sur ordre de Machiavel et des dirigeants de Florence, qui veulent faire démonstration de leur bonne volonté.

C’est au même titre qu’on l’a envoyé 20 ans auparavant à Milan, comme cadeau diplomatique à l’intention de Ludovic Sforza.

 

 « Un jour, César Borgia […] aborda avec son armée une rivière large de 20 pas et ne trouva pas de pont ni quelconque matériel pour en fabriquer un, excepté une pile de rondins mesurant tous 16 pas », écrit Pacioli, probablement sur la base de ce que lui a narré Léonard.

« De ce bois, n’utilisant ni fer, ni corde, ni aucun autre matériau de construction, son noble ingénieur construisit un pont suffisamment robuste pour que l’armée puisse l’emprunter »

Dans le carnet de Léonard, le croquis d’un pont autoportant de ce type (fig. 86 ) comporte 7 rondins courts et 10 autres plus longs présentant chacun des encoches leur permettant d’être assemblés sur place.

 

En mars 1493, Christophe Colomb revient sain et sauf de son premier voyage à travers l’océan Atlantique, et le récit de ses découvertes se répand rapidement dans toute l’Europe, bientôt suivi d’une pléthore d’autres récits d’explorations extraordinaires.

Amerigo Vespucci, dont le cousin Agostino a travaillé avec Machiavel à la chancellerie florentine, participe au troisième voyage de Colomb en 1498 ; l’année suivante, il entreprendra son propre périple à travers l’Atlantique, atteignant les côtes de ce qui est aujourd’hui le Brésil.

Contrairement à Christophe Colomb, qui pensait avoir trouvé la route des Indes, Vespucci ne se trompe pas en affirmant à ses clients florentins qu’il est « arrivé sur une terre nouvelle qui, à maints égards, […] s’apparente à un continent ».

La justesse de son hypothèse lui vaut de donner son nom à ce continent qu’on dénomme « Amérique ».

 

Lorsque Léonard quitte Florence pour Milan en 1482, Michel-Ange n’a que sept ans.

En 1500, les deux artistes sont de retour à Florence. Michel-Ange, alors âgé de 25 ans, est un sculpteur reconnu mais irascible, au contraire de Léonard, alors âgé de 48 ans, qui est connu pour être un peintre génial et généreux entouré de nombreux amis et de jeunes étudiants.

Michel-Ange a tendance à se spécialiser dans les représentations de corps masculins dénudés et musclés

Léonard, au contraire, s’enorgueillit du caractère « universel » de ses sujets.

« Le peintre doit s’efforcer d’être universel. C’est un grand manque de dignité que de bien réussir une chose et mal une autre comme beaucoup qui n’étudient que les mesures et proportions du nu sans rechercher en quoi il varie », écrit-il. Il ajoute : « Cette pratique mérite un blâme sévère »

Les critiques de Léonard à l’égard de Michel-Ange sont suscitées plus largement par le fait qu’il considère que la peinture est un art supérieur à la sculpture.

La peinture embrasse et contient en soi toute chose perceptible dans la nature, ce à quoi la pauvreté de la sculpture ne peut prétendre : cette dernière ne peut ainsi pas montrer toutes les couleurs et leurs nuances.

Le peintre figurera les différentes distances en variant les couleurs de l’air qui s’interpose entre les objets et l’œil.

Il saura montrer avec quelle difficulté l’image des différents types d’objets traverse les brumes. Il figurera comment les montagnes et les vallées apparaissent à travers les nuages de pluie. Il représentera jusqu’à la poussière elle-même, et comment les combattants la soulèvent et l’agitent.

 

La preuve découverte en 2005, que l'auteur mentionne au chapitre 21 en reprenant la chronologie de Sainte Anne, devrait lever définitivement tout mystère ou toute confusion.

Il s’agit d’une note griffonnée par Agostino Vespucci en 1503 en marge de l’édition de Cicéron, qui mentionne « la tête de Lisa del Giocondo » comme l’une des peintures auxquelles Léonard travaille à cette époque.

Il arrive, même avec Léonard, que ce qui semble être un mystère n’en soit finalement pas un. En effet, une explication simple suffit.

La Joconde est bel et bien Mona Lisa, Lisa del Giocondo.

Cela dit, la peinture dépasse le portrait de la femme d’un marchand de soie et constitue certainement bien plus qu’une simple commande.

Après quelques années, et probablement depuis le début, Léonard la peint pour lui-même, comme une œuvre universelle et éternelle, plutôt que pour Francesco del Giocondo.

Léonard ne livrera jamais le portrait et, à en juger par ses relevés bancaires, ne percevra jamais aucun denier pour ce dernier.

Au lieu de cela, il l’emporte avec lui à Florence, à Milan, à Rome et en France, jusqu’à sa mort, 16 ans après avoir posé la première touche.

Au cours de cette période, il ajoute fine couche de glacis sur fine couche de glacis à mesure qu’il la perfectionne, la retouche et l’enrichit de nouvelles connaissances approfondies sur les humains et la nature.

Quelques nouvelles idées, appréciations et inspirations lui viennent à l’esprit et le pinceau se pose délicatement sur le panneau de peuplier, encore et encore.

La Joconde, comme Léonard lui-même, gagne progressivement en complexité à chaque étape de son odyssée.

À l’instar des peintres néerlandais du XVe siècle tels que Jan van Eyck, Léonard utilise des glacis comportant une très faible proportion de pigment mélangé à de l’huile.

Pour les ombres du visage de Lisa, il est le premier à mélanger le fer et le manganèse pour créer un pigment de couleur ambre brûlé et absorbant bien l’huile.

Selon les conclusions d’une analyse par spectrométrie de fluorescence X publiée en 2010, « l’épaisseur d’un glacis brun placé sur une base rose sur les joues de Mona Lisa varie graduellement d’à peine 2 à 5 micromètres à environ 30 micromètres, au niveau de l’ombre la plus profonde ».

L’analyse montre que les touches ont été intentionnellement appliquées de manière irrégulière afin de donner au grain de la peau un aspect plus réaliste.

 

Dans de nombreux autres portraits réalisés par Léonard, y compris les premières versions de La Belle Ferronnière, les yeux du sujet semblent suivre le spectateur dans son déplacement.

Des dizaines d’experts ont étudié La Joconde afin de déterminer les raisons scientifiques de cet effet. Il s’explique en partie par le fait que, dans le monde réel tridimensionnel, les ombres et la lumière d’un visage changent en fonction de l’angle suivant lequel on l’observe, ce qui n’est pas le cas dans un portrait bidimensionnel.

Par conséquent, nous avons la sensation qu’un modèle figuré sur un tableau et regardant droit devant lui nous fixe, et ce, même si nous ne sommes pas directement en face de la peinture.

Par sa maîtrise des ombres et de la lumière, Léonard parvient à amplifier ce phénomène dans La Joconde.

 

Grâce à ses études d’optique, Léonard réalise que les rayons lumineux n’atteignent pas qu’un seul point dans l’œil, mais plutôt toute la zone de la rétine.

Grâce à cette connaissance, Léonard est capable de créer un sourire insaisissable, qui se dérobe à celui qui veut trop le voir.

Des scientifiques ont récemment trouvé un moyen technique de décrire tout cela.

Selon Margaret Livingstone, neuroscientifique de la Faculté de médecine de l’Université Harvard à Boston, aux État-Unis, « un sourire clair est beaucoup plus apparent dans les images de basses fréquences spatiales [plus troubles].

Ainsi, si vous regardez la peinture de telle manière que votre regard se porte sur l’arrière-plan ou sur les mains de Mona Lisa, votre perception de sa bouche sera dominée par les basses fréquences spatiales, et son sourire apparaîtra donc plus enjoué que si vous fixez directement sa bouche. »

Une étude menée à l’Université de Sheffield Hallam montre que Léonard utilise non seulement la même technique pour La Belle Ferronnière, mais aussi pour le dessin récemment découvert de La Belle Princesse.

 

Chapitre 32 - France : Dernier voyage

Léonard passe une grande partie de sa carrière à chercher des mécènes inconditionnellement paternalistes, encourageants et indulgents, en tout cas plus que son propre père ne l’a généralement été à son égard.

Piero de Vinci a bien trouvé une bonne place d’apprenti pour son fils et l’a aidé à obtenir des commandes, mais son attitude aura été inconstante jusqu’au bout : après avoir refusé de reconnaître son fils, il l’exclura de son testament.

À Léonard, il lègue donc avant tout le désir insatiable de trouver un protecteur qui l’acceptera de façon inconditionnelle.

 

Grâce à la grande culture de sa mère, Louise de Savoie, et à sa suite de tuteurs dévoués et accomplis, François I er se voit inculquer un amour de la Renaissance italienne. Contrairement aux ducs et princes italiens, les rois français collectionnent très peu de tableaux et pratiquement aucune sculpture, et l’art français reste largement dans l’ombre des artistes italiens et flamands.

François s’efforce de changer cette situation. Il a pour ambition d’initier la France à la Renaissance qui a gagné toute l’Italie, et il y parviendra en grande partie.

Il cherche également avec un appétit vorace à accroître ses connaissances dans des domaines aussi variés que ceux qui passionnent Léonard. Il aime les sciences et les mathématiques, la géographie et l’histoire, la poésie, la musique et la littérature. Il apprend l’italien, le latin, l’espagnol et l’hébreu. Sociable et amoureux des femmes, il a une allure fringante et entretient une réputation de danseur gracieux, de grand chasseur et de lutteur

 

François Ier s’avère être le mécène idéal pour Léonard.

Il admire le maître sans réserve, ne l’importune jamais pour qu’il finisse ses tableaux, encourage son amour de l’ingénierie et de l’architecture, l’incite à monter des spectacles et des fantaisies, lui offre un foyer confortable et lui verse une rémunération régulière.

Léonard reçoit le titre de « premier peintre, ingénieur et architecte du roi », mais sa valeur aux yeux du roi réside dans son intelligence et non dans sa production.

François a une soif insatiable de connaissances et Léonard est la meilleure source au monde de savoir empirique. Il peut former le roi sur pratiquement n’importe quel sujet, depuis le fonctionnement de l’œil jusqu’aux raisons pour lesquelles la Lune brille.

 

François est « complètement épris » de Léonard, selon le sculpteur Cellini.

« Il prenait tant de plaisir à l’entendre discourir que peu de jours passaient sans qu’il soit en sa compagnie, ceci étant l’une des raisons pour lesquelles Léonard ne put jamais faire aboutir ses miraculeuses études. »

Cellini cite ensuite François, lequel déclare qu’il « n’aurait jamais pu croire qu’il y eût un autre homme en ce monde qui en sache autant que Léonard, non seulement sur la sculpture, la peinture et l’architecture, mais dans tous les domaines ; c’est véritablement un grand philosophe». 

François Ier offre à Léonard quelque chose qu’il n’a cessé de poursuivre : une rémunération confortable, indépendante de la quantité de tableaux qu’il produit.

 

De plus, un petit manoir de brique rouge est mis à sa disposition, orné de grès et de flèches originales, à proximité du château de François à Amboise, dans la vallée de la Loire.

Connue sous le nom de manoir du Cloux à l’époque, ou Clos Lucé de nos jours, la demeure de Léonard (fig. 138) est située au cœur d’un hectare de jardins et de vignobles, et un tunnel la relie au château d’Amboise, à un demi-kilomètre de là.

 

Comme il l’a fait pour ses précédents mécènes, Léonard conçoit et met en scène des spectacles pour le roi François Ier.

En mai 1518, par exemple, des festivités sont organisées à Amboise à l’occasion du baptême du dauphin et du mariage de la nièce du roi.

Les préparations incluent la construction d’une arche surmontée d’une salamandre et d’une hermine symbolisant le rapprochement entre la France et l’Italie.

La place est transformée en forteresse théâtrale avec une artillerie fantoche « tirant des balles gonflées à l’air avec grand fracas et fumée », selon la dépêche d’un diplomate.

« En retombant sur la place, ces balles rebondissaient en tous sens pour le plus grand plaisir de tous et sans causer de dommages. »

À la fin de l’année 1517, il accompagne le roi à Romorantin, où il demeure jusqu’en janvier 1518.

Sur ce qui pourrait être la dernière page de ses carnets, Léonard dessine 4 triangles rectangles présentant des bases de longueurs différentes (fig. 143).

À l’intérieur de chacun d’eux, il place un rectangle, puis remplit au crayon noir les zones restantes.

Au centre de la page, il trace un tableau dont les cellules contiennent les lettres associées à chaque rectangle.

Il décrit au-dessous ce qu’il tente d’accomplir. Comme il l’a fait de façon obsessionnelle au fil des ans, il recourt à la géométrie pour tenter de comprendre la transformation des figures.

Plus précisément, il essaie de saisir la formule qui lui permettrait de conserver l’aire d’un triangle rectangle tout en faisant varier la longueur des deux côtés se rejoignant à l’angle droit.

 

« Comme une journée bien passée

apporte un sommeil heureux » 

a écrit Léonard 30 ans plus tôt,

« une vie bien dépensée entraîne une mort heureuse ».

La sienne survient le 2 mai 1519,

moins de 3 semaines après son 67e anniversaire.

 

Walter Isaacson: The Making of a Genius
( video 33 mn ci-dessous )

Ce qui fait de Léonard un génie, ce qui le distingue de ceux qui ne sont qu’extraordinairement intelligents, c’est sa créativité, sa capacité d’appliquer l’imagination à l’intellect.

Sa facilité à combiner l’observation avec la fantaisie lui permet, comme à d’autres génies créatifs, de faire des bonds inespérés pour relier le visible à l’invisible.

Le génie de Léonard se distingue également par sa nature universelle.

Le monde a produit d’autres penseurs plus profonds ou plus logiques, et beaucoup d’autres plus pragmatiques, mais aucun qui n’a été aussi créatif dans autant de domaines différents.

Certains sont des génies dans des disciplines précises, comme Mozart en musique ou Euler en mathématiques.

Mais l’esprit brillant de Léonard couvre de multiples disciplines, qui l’ont chacune enrichi d’un sens profond des motifs récurrents de la nature, mais aussi de ses contre-courants.

Sa curiosité le pousse à figurer parmi la poignée des personnages qui, dans l’histoire de l’humanité, ont tenté de savoir tout ce qu’il y a à savoir sur tout ce qui peut être su.

C’est un autodidacte qui par sa volonté a tracé son propre chemin vers son génie.

Isaacson, Walter. Léonard de Vinci (French Edition).

Presses Polytechniques Universitaires Romandes. Édition du Kindle. 

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